La peinture Rosier-feuilles prend vie dans le spectacle Century song de Neema Bickersteth et Jason Manson au Centaur!
Je suis sortie bouleversée de la beauté exceptionnelle du spectacle plurisdisciplinaire Century Song, présenté récemment au théâtre Centaur de Montréal les 14, 15 février en soirée . et le dimanche16 février en matinée.
Century Song est une éblouissante production, imaginative et touchante du Théâtre Volcalno, de Toronto, qui revient d’une tournée européenne et amorce bientôt, en avril, sa tournée américaine en Californie, à Paolo Alto et à Berkeley, près de San Francisco. Cette œuvre multidisciplinaire du metteur en scène torontois Ross Manson, de la soprano virtuose, Neema Bickerbeth et de la chorégraphe Kate Alton, allie le chant sous forme de vocalise, le piano et la percussion, la danse, le mime, le théâtre, les arts visuels et la vidéo, autour d’un récit épique du XXe siècle. Ce collage musical improbable associe des extraits musicaux de Rachmaninoff à Asperghis, des chants primitifs sud-africains à la musique de John Cage, le sublime solo du Quatuor pour la Fin du temps d’Olivier Messien à des rythmes de jazz, interprétés par la chanteuse-danseuse accompagnée par deux musiciens de grand talent, un pianiste et une percussionniste. En arts visuels, il allie les estampes et les peintures de l’expressionniste allemande Kathe Kollwitz et la peinture automatiste Rosier feuille, de Marcel Barbeau, la mise en abîme des vidéo Pop Art The Hallway of progress et de Endless city, de fettFilm. La fluidité avec laquelle le réalisateur, l’équipe technique et la soprano-danseuse ont réalisé le passage entre des œuvres de Kollwitz à la peinture all over de Barbeau, de 1946, qui enveloppe et projette la musique, dans laquelle Neema Bickerbeth chante, danse et joue toutes la luttes pour la liberté et particulièrement celles des femmes noires est remarquable. C’est un moment fort de cette représentation. Notons que Marcel Barbeau avait approuvé de son vivant cette utilisation de son œuvre qui lui rappelait les luttes qui avait été le théâtre de la production de ses tableaux de cette période de trouble et de libération. Il était honoré de son association avec cette jeune compagnie de théâtre innovatrice. Il aurait été touchée du spectacle d’hier.
Tout cela n’atteindrait pas un tel sommet artistique sans le talent et la flamme de la grande soprano Neema Bickersteth qui maîtrise à la fois la danse, le chant et le mime, et dont le chant d’une extrême expressivité se double d’une virtuosité étonnante, passant constamment, en quelques secondes de la maîtrise des techniques vocales classiques les plus sophistiquées aux techniques vocales de la musique contemporaine et même à celles des chants primitifs sud-africains ou à celles de la musique vocale de jazz. Bref, elle offre un spectacle où la parfaite maîtrise d’une versatilité hors des sentiers battus est portée par une extrême sensibilité en hommage aux femmes noires qui, dans le quotidien ont transformé nos sociétés au XXe siècle. À la sortie, les spectateurs émus et enchantés n’avaient qu’un désir : revoir ce spectacle au plus tôt. Pourtant, malgré la qualité et l’originalité de ce spectacle et ses succès récents en Europe, notamment au prestigieux Festival d’Edimbourg, par manque de couverture médiatique, il restait encore des places pour les dernières représentations lors de la première, alors que des amateurs d’arts visuels et des mélomanes risquaient de passer à côté de ce pur joyau. On ne peut que souhaiter qu’un autre théâtre ou une salle de spectacle l’accueille à nouveau sur le sol québécois.
Ninon Gauthier, PhD, Historienne de l’art, Présidente Fondation Marcel Barbeau
Prochains spectacles à “Scott Joplin’s Treemonisha “, Berkeley et à “Stanford Live“, Paolo Alto, en banlieue de San Francisco. Details : www.volcano.ca.
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